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Malka Marcovich...enjeux internationaux
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27 mars 2008

Tentative de censure au Conseil

Litman_26_marsIl n'est pas aisé pour un Président de rester indépendant et maître à bord au CDH. Chaque jour amène de nouvelles tempêtes, propres à faire chavirer plus encore les promesses des droits humains.
Le Président roumain Doru Romulus Costea, dont le mandat s'achevera lors de la prochaine session de juin, n'a pas toujours réussi à conserver une attitude équilibrée en toutes circonstances.
C'est lui qui annonça entre deux séances, dans l'indifférence générale, sans autre forme de procés, la révocation le 13 mars de la Rapporteure Spéciale sur la traite, Madame Sigma Huda.
C'est encore lui qui le 25 mars, coupa aprés 11 secondes la représentante de l'Association pour une éducation mondiale (AWE), cèdant ainsi aux pressions exercées par la Chine qui refusait que l'on évoqua le Tibet.
Le 26 mars, l'AWE était à nouveau sur la sellette et ce fut au tour de l'Egypte, de la Palestine et de l'Iran de chercher à censurer l'orateur. Durant plus de 11 minutes, ces délégations tentèrent par tous les moyens de faire taire l'ONG. On doit ici saluer la manière dont le Président Costea a défendu ici les règles de procédures protégeant la liberté d'expression.

La retranscription de ces échanges plus bas est tout à fait révélatrice de l'atmosphère d'intimidation qui règne au CDH. Voici en préambule le résumé tel qu'il figure dans le Communiqué de Presse en français de la séance du 26 et le texte intégral de la déclaration en pdf : ASSOCIATION_FOR_WORLD_EDUCATION_26_March

M. DAVID LITTMAN (Association for World Education) a déploré que le Rapporteur spécial sur le racisme ait manqué de mentionner la plus odieuse des diffamations religieuses qui constitue à citer un chapitre ou un verset des saintes écritures pour justifier les appels à tuer au nom de Dieu ou d'Allah. Les appels à tuer au nom d'Allah, a poursuivi l'intervenant, doivent être condamnés sans équivoque par les théologiens musulmans comme «diffamation de l'islam». Cependant, ces appels ont été justifiés notamment par le Grand Sheikh de Al-Azhar Muhammad Sayyed Tantawi, par Sheikh Yusuf Al-Qaradhawi et beaucoup d'autres dont Osama ben Laden. M. Littman a en outre condamné le fait que l'antisémitisme déguisé sous l'antisionisme constitue un fléau dans le monde musulman, et touche également l'Europe. S'exprimant sur le contenu des programmes d'enseignement, M. Littman a condamné le fait que le même type de haine raciale est enseigné en Égypte, en Arabie saoudite, en Palestine, en Syrie et en Iran. M. Littman a finalement demandé au Conseil s'il est prêt à condamner les appels à tuer au nom de Dieu.

Retranscription des interventions

O secondes
David Littman (AWE):
"Merci Monsieur le Président....."

38 secondes plus tard
Président Costea :
"Nous avons un point d’ordre demandé par l’Egypte. Excusez moi. Vous avez la parole Monsieur."
L'Egypte :
"Excusez moi d’interrompre la réunion Monsieur le Président.
Je veux être sûr - comme je n’étais pas là le 24 janvier - que la personne à qui on vient de donner la parole est la même personne qui, répondant  au président, a insulté le Conseil à l’époque, a dit qu’il y avait quelque chose de pourri dans ce Conseil. Pourriez vous vérifier s’il vous plait si c’est le même orateur qui a insulté le Conseil et le Président, à qui vient d'être donnée la parole ? Merci "

1 minute 27
Président Costea :
"Le distingué représentant de la Palestine a demandé la parole."
La Palestine :
"
Ma délégation soutient entièrement ce qui vient d’être dit par l’Egypte. Et à nouveau nous souhaitons dire combien nous sommes choqués de voir que la parole a été donnée à ce même distingué représentant d’une ONG pour parler dans cet endroit respectable. Merci."

2 minutes
Président Costea :
"Y a-t-il d’autres demandes de parole ? Cela ne semble pas le cas.
Laissez moi rappeler que l’ONG dont nous parlons a un statut consultatif, elle remplit pleinement les droits d’accréditation. En conséquence, elle a le droit d'intervenir "
Se tournant vers l'ONG AWE
"
Vous pouvez continuer Monsieur. "
Excusez moi, un instant. Un point d’ordre. "

Se tournant vers l'Egypte.
"Est-ce une question ou un point d’ordre Monsieur ? Un point d’ordre, vous avez la parole"

2 minutes 45
L'Egypte :
" Monsieur le Président. Je ne vais pas prolonger la discussion. Cela n’en vaut pas la peine de toute façon. Je me demande seulement comment nous pouvons donner la parole à quelqu’un qui a insulté le Conseil. Le fait qu'une organisation ait un statut ou non n'est pas important. J’ai travaillé dans le comité des ONG durant quatre ans et je sais comment les statuts sont donnés. Pouvez vous obtenir un statut et ensuite faire tout ce que vous voulez avec le statut ? Insulter les pays ? Le Conseil et ses membres ?
Je ne pense pas que nous puissions faire cela Monsieur le Président. Je ne pense pas que ce type d’intervenant devrait être autorisé à insulter le Conseil. C’est une insulte contre la société civile dans son ensemble, pas seulement contre le Conseil. Mais encore, cela ne vaut pas la peine d'insister. A vous de décider Monsieur le Président. "

3 minutes 30
Président Costea :
"
Merci. Le fait qu’une ONG puisse participer ou non à un débat ou une discussion dans un organe de l’ONU n’est pas décidé ici mais ailleurs. Aussi, étant donné les circonstances, sauf s'il en est décidé autrement, nous continuerons à écouter les déclarations qui sont présentées par les ONG qui tombent dans cette catégorie.  J’espère que je suis assez clair.
Deuxièmement, je demande à toutes les délégations d’exprimer de la retenue dans leurs déclarations. Je répète. Je voudrais inviter toutes les délégations à exprimer de la retenue dans leurs déclarations. Toutes les délégations.
Troisièmement, j’inviterai également tous les orateurs à gardez à l’esprit que nous nous trouvons dans un organe qui appartient à l’ONU, où nous sommes supposés nous occuper de questions sur lesquelles nous pouvons ne pas être d’accord, mais où nous avons, nous devons aborder les sujets en respectant  l’opinion des autres. Je voudrais aussi encourager l’audience d’obéir aux lois de la décence et d’être prête à entendre autrui, exprimer ses opinions, et cela de manière à ne pas porter atteinte à cet édifice et à cette institution. J’espère que nous parviendrons à continuer dans cette atmosphère. Merci. Je redonne la  parole à l’intervenant qui faisait son intervention l’Association pour une éducation mondiale. Vous avez la parole Monsieur.

6 minutes 27
Le représentant de AWE :
"
Monsieur le Président. Merci beaucoup pour votre compréhension…."

7 minutes 12
Président Costea :
"
Excusez moi, j’ai un point d’ordre de la part du distingué délégué égyptien. Vous avez la parole Monsieur."egypte
L'Egypte :
"Merci Monsieur le Président.
Je n’ai pas l’intention d’aider l’intervenant à se retrouver en première page des journaux. C’est ce qu’il recherche. Mais je n’accepterai pas que le Sheikh de Al-Azhar soit utilisé dans la même phrase qu’Osama Ben Laden. Cela je ne l’accepte pas. Cela m'importe peu de savoir combien il reçoit pour dire ça. Mais ça je ne l’accepte pas. Aussi simplement que ça. Sheikh de Al-Azhar est la tête de la plus prestigieuse université musulmane au monde qui a existé depuis onze cent ans. Il a promu l’Islam dans le monde entier. On ne peut le citer dans la même phrase qu’Osama Ben Laden. Merci."

8 minutes 03
Président Costea :
"Merci, je redonne la parole à l'orateur"
Le représentant
de AWE :
"Deuxièmement, le rapporteur spécial....."

9 minutes 31
Président Costea :
"Excusez moi Monsieur, Il y a un point d’ordre du distingué représentant de l’Iran. Vous avez la parole Monsieur"
République islamique d'Iran:
"Merci Monsieur le Président. Si je comprends bien, nous sommes sur le point 9 de l’ordre du jour qui porte sur le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui lui est associée. Il apparaît que l’orateur se concentre sur l’Islam et certains pays islamiques en les insultants. Aussi je vous demande Monsieur le Président, de diriger l'attention de l'orateur sur le sujet de la discussion. Je vous en serais gré.  Merci Monsieur le Président."

10 minutes 26
Président Costea :
"Merci. J’ai fait une déclaration il y a cinq minutes. Je ne vais pas la répéter. J’encouragerai les délégations qui ont peut-être d’autres opinions que celles présentées par les orateurs de se souvenir qu’il existe une méthode, une manière d’agir. C’est celle d’exercer son droit de réponse lorsque le temps est venu. Nous n’avons jamais jamais nié ce droit dans ce Conseil. Vous avez la parole Monsieur.
Le représentant
de AWE :
"... merci Monsieur le Président."

11 minutes 26  - FIN -

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Commentaires
C
Bravo pour ce compte-rendu d'une clarté hélas aveuglante quant à la manière dont les Etats tentent de faire taire les ONG.<br /> En effet, le Président Costea est exceptionnellement juste. <br /> Les ONG devraient lui adresser des félicitations pour l'encourager et pour qu'il sache combien il est apprécié.
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